Aventure microscopique

Publié le par pac

Ecrire un peu dans l'urgence parce que quelque chose ne passe pas. Pour se décontrarier. Pour se purger.

Ce qui ne passe pas : nous jouons Les Aventures de Nathalie Nicole Nicole Marion Aubert. Nous en sommes encore à la mise en scène. Après plusieurs mois de travail sur le texte, je constate que la distribution n'est pas équitable, . Je dois préciser qu'il s'agit d'une distribtion tournante et que c'est nous qui l'avons faite. Contrariée de n'avoir quasiment pas joué lors de la dernière répétition, je fais un tableau récapitulatif et je constate que je suis effectivement celle qui est le moins souvent sur scène... Je m'efforce de voir clair en moi, de ne pas me laisser dominer par mes sentiments. Ce qui monte en moi : essentiellement une rancoeur envers J. qui m'a plusieurs fois laissé entendre qu'elle n'avait pas beaucoup de texte et qui n'a pas hésité une seconde lorsque je lui ai laissé un rôle sur une séquence. M'a-t-elle seulement remerciée ? Mon tort est de m'être si facilement (laissée) cupabilisée / er... Ma tendance à m'effacer ou à me mettre en retrait découle autant d'un manque de confiance en moi que de la culpabilité de celle qui réussit tout ce qu'elle entreprend, qui est mince et presque jolie enfin ça dépend des jours, bref, qui n'a pas à se plaindre... J'ai cru déceler chez J. une sorte de jalousie rentrée, une étroitesse humaine masquée par une sociabilité débordante, et c'est bien elle aujourd'hui qui occupe le plus long temps de jeu.

Comment se dégager de ce que les rapports humains ont de tellement régressant ? Comment ne pas être esclave de l'intersubjectivité et de tout ce qu'elle active inévitablement en nous ? Faut-il au contraire y plonger pour agir sur la conscience d'autrui et se laisser agir par lui de l'intérieur ? Ou bien ai-je raison d'espérer trouver un point de surplomb qui me sépare des autres tout en me préservant ? Je me prive ainsi de l'euphorie d'appartenir à ce groupe. Ou bien faut-il aller, comme je l'ai longtemps fait, faut-il aller droit à l'émotion.

Ce que m'enseigne la vie : que la réalité est déceptive et que les amitiés sont rares.

Il me semble difficile de faire la part des choses au théâtre parce que je ne sais pas dans quelle mesure le magma egotiste est facteur de création et dans quelle mesure il est un obstacle à l'équilibre du groupe. Jouer c'est lâcher des fauves qu'on a l'habitude de tenir en cage mais on les lâche dans un espace circonscrit de contraintes magiques. Le théâtre domestique l'émotion tout en en cultivant la sauvagerie. 

Ecrire tout ceci m'a tendue plus encore que je ne l'étais. Me voici triste de ce constat qui me conduit à dominer encore une frustration ou, plus profond que cela, un sentiment d'injustice à l'égard de J. Une petite voix me susurre qu'il y a pire dans la vie... Je déteste ce relativisme bien pensant. On n'a qu'une vie, et qu'y a t-il de plus important que cette lutte qu'on engage contre soi et contre les autres pour exister, simplement advenir d'une manière singulière et définitive.


Je pense à D. et à son fils qui présente des traits autistiques. D. malaxe la réalité, elle agit sur elle en taillant dans le vif. Elle la transforme et elle puise dans ce pouvoir sa propre énergie. J'éprouve au même instant cet instinct de repli dont j'ai parlé tout à l'heure, puissant, régressif, motivé par la peur ou par une sagesse très enfouie. L'homme est un prédateur pour l'homme, y compris un prédateur psychique ...

 

ll faudra que je développe cette idée de la prédation psychique.

 

Et le désir dans tout cela ? Je le domine hélas lui aussi. J'ai des envies de déchaînement qui me blessent en secret.

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