retour au pays natal
Je reviens.
Tous ces gens que je retrouve et que je rencontre à nouveau.
Qui suis-je, me dis-je, en traversant la galerie des glaces ?
Ma mère me sourit, elle détient des clefs que je ne peux pas lui demander.
Mon identité s'opacifie.
C'est moi qui arrive dans le quotidien des autres.
Le tissu de mon quotidien s'est ajouré au soleil de l'altérité de gens pourtant si familiers...
Ce retour est très étrange. Je cache ma fragilité sous une brusquerie qui me rend étrangère à moi-même, et si désagréable, si peu sympathique, peu aimable finalement au moment où je voudrais tant être rassurée. Mais je suis avare. Je suis sèche et rigide, dissimulant même pour moi mes fêlures.
Je m'étoile, anxieuse et discontinue. Convaincue d'être odieuse par trop d'aspects qu'il faut masquer. Guindée, contenue, corsetée.
Qui es-tu, ma mère ? Qui suis-je pour toi ? Pourquoi ai-je besoin chaque jour de te voir et chaque fois te voyant pourquoi ne sais-je plus quoi te dire ? Pas un mot qui tienne. Ma mère, elle me dit que la frange ne me va pas, la couleur de cheveux non plus ou bien rien, ou encore, je crois parfois sentir que je la menace ... Voici comment je m'éprouve en sa présence : brusque, grossière, dépendante, en quête de reconnaissance, vieille, voulant tout maîtriser pourtant, froide, quotidienne, matérielle et matérialiste, dépourvue d'humour, sèche ... seule ? fusionnelle en face de quelqu'un qui se dérobe, bourrée de questions confuses en face de quelqu'un qui n'aime pas parler d'elle, ni de ce qu'elle ressent, contradictoire et conflictuelle en face d'un monolithe. Un jour à Bordeaux, c'est moi qui pleure en la retrouvant. Un autre jour encore, à Brive, il y a peu, c'est moi encore qui pleure en la quittant. Elle non. Et hier, elle pleure en me retrouvant, et moi non. Jamais synchrones. Impression qu'on se rate constamment. Maman. Qui es-tu ?
La mère n'a-t-elle pas l'avantage de la connaissance ? Je me sens dépossédée par son savoir, pressentiment toujours changeant d'une avance à la fois considérable et impalpable. Mais ce savoir - clef fantasmée de mon identité - qu'est-il au juste ? Et moi, ne la déstabilisé-je pas, un peu ? Ou bien juge-t-elle ce que je suis devenue ? Jugement qui peut d'un coup me tuer, je pense ou bien il faudrait que je la tue, elle. J'arrive aux endroits où je me dégoûte et me désespère. Inféconde et étroite.Qui suis-je, me dis-je, en traversant la galerie des glaces ?
Ma mère me sourit, elle détient des clefs que je ne peux pas lui demander.
Mon identité s'opacifie.
C'est moi qui arrive dans le quotidien des autres.
Le tissu de mon quotidien s'est ajouré au soleil de l'altérité de gens pourtant si familiers...
Ce retour est très étrange. Je cache ma fragilité sous une brusquerie qui me rend étrangère à moi-même, et si désagréable, si peu sympathique, peu aimable finalement au moment où je voudrais tant être rassurée. Mais je suis avare. Je suis sèche et rigide, dissimulant même pour moi mes fêlures.
Je m'étoile, anxieuse et discontinue. Convaincue d'être odieuse par trop d'aspects qu'il faut masquer. Guindée, contenue, corsetée.
Qui es-tu, ma mère ? Qui suis-je pour toi ? Pourquoi ai-je besoin chaque jour de te voir et chaque fois te voyant pourquoi ne sais-je plus quoi te dire ? Pas un mot qui tienne. Ma mère, elle me dit que la frange ne me va pas, la couleur de cheveux non plus ou bien rien, ou encore, je crois parfois sentir que je la menace ... Voici comment je m'éprouve en sa présence : brusque, grossière, dépendante, en quête de reconnaissance, vieille, voulant tout maîtriser pourtant, froide, quotidienne, matérielle et matérialiste, dépourvue d'humour, sèche ... seule ? fusionnelle en face de quelqu'un qui se dérobe, bourrée de questions confuses en face de quelqu'un qui n'aime pas parler d'elle, ni de ce qu'elle ressent, contradictoire et conflictuelle en face d'un monolithe. Un jour à Bordeaux, c'est moi qui pleure en la retrouvant. Un autre jour encore, à Brive, il y a peu, c'est moi encore qui pleure en la quittant. Elle non. Et hier, elle pleure en me retrouvant, et moi non. Jamais synchrones. Impression qu'on se rate constamment. Maman. Qui es-tu ?